• Thé, café ou chocolat ?

     

    Thé, café ou chocolat ; du plaisir au quotidien ; les fruits d’une mondialisation dont on aurait bien du mal à se passer, du haut en bas de l’échelle sociale et quelle que soit notre fonction sociétale.

    La mondialisation ? Fruit de tous nos maux ?

    Non ! Fruit de nos besoins, de nos addictions, de nos spécificités géographiques, mais aussi de nos contradictions, si ce n’est de nos incohérences.

    Le thé, le café et les graines du cacaoyer pèsent lourd dans notre déficit commercial. Dans ce domaine, nos agriculteurs, qui ne sont pas les derniers à espérer voir leurs porcs, poulets, betteraves, blés et vins, s’écouler au-delà de nos frontières, sont hors-jeu ; dame nature n’y est pas étrangère. Certes, quelques expériences menées dans les territoires d’Outre-Mer et même en Métropole laissent à penser que l’on est en capacité de disposer d’un thé ou d’un cacao label français, mais combien de temps faudra-t-il pour pouvoir jouer dans la cour des grands, si tant que ce soit là l’intention ?  

    Faut-il en arriver à souhaiter une accélération du réchauffement climatique pour que l’on puisse voir s’épanouir des plants de Coffea Canephora (café robusta) ou de Coffea Arabica et répondre à hauteur de nos besoins, quitte à regretter le bon temps où l’on pouvait cultiver ces bons légumes pour qui soleil point trop n’en faut. Cela ne va pas être coton pour en arriver là. Je ne suis pas convaincu que cela soit souhaitable.

    Et puisque j’évoque le coton, peut-on là aussi croire au miracle ? Dans le Gers, une expérience engagée voici huit ans, la seule à ma connaissance en France, semble prometteuse, puisque trois céréaliers associés ont réussi, à partir de six graines de cette fibre végétale, à produire du coton en suffisance pour donner naissance à une marque de polos ; et cela, si on les croit sur parole, sans recours aux pesticides 

    On ne peut que les encourager à poursuivre, mais n’est-ce pas une goutte d’eau « pure » face à la montée en puissance de la « fast fashion » dont la presse vient de se faire l’écho ? Le phénomène ne date pas d’aujourd’hui, mais aux dires des commentateurs il prend une ampleur inquiétante. Après la vague du fast food, source première des tempêtes qui secouent le monde agricole, celle du fast fashion s’annonce ravageuse pour le secteur de l’habillement. Là encore, les réseaux dits sociaux, n’y sont pas pour rien.

    Cible privilégiée des influenceurs, ces nouveaux communicants aux allures de propagandistes : la jeunesse. Celle-ci trouve par ce biais le moyen de s’habiller à pas cher tout en étant, priorité des priorités, à la mode du jour…en oubliant, cette fois, les méfaits environnementaux et sociétaux de cette stratégie développée par des industriels sans scrupules ?

    Les vêtements de fast fashion sont souvent faits en matières synthétiques (polyester, polyuréthane, molécule dérivée du pétrole) ou en coton non-biologique. Ils sont fabriqués dans des pays du tiers-monde, notamment au Bengladesh, mais là encore, la Chine entend tirer, elle aussi, son épingle du jeu sur la Route de la Soie.

    Image saisissante ce dernier week-end : alors même que le Salon de l’Agriculture s’apprêtait, colère non éteinte, à fermer ses portes, les bénévoles des Restos du Cœur en appelaient à notre générosité à l’entrée de ces grandes surfaces, temples de l’abondance, du choix, voire de la surconsommation. Les Restos du Cœur ? Il n’était pas dans les intentions de Coluche d’en faire une institution pérenne ; l’an prochain, on « fêtera » le quarantième anniversaire. Cherchez l’erreur !

    Plagiant ce célèbre humoriste, force est de reconnaître que le « chimie-blique » qui fait notre quotidien nous pose plus de questions que de réponses. Rien n’est simple, tout se complique. Raison de plus pour ne pas mettre la charrue avant les bœufs.

    Il appartient bien évidemment aux politiques d’échafauder des stratégies qui allient équilibre mondial des échanges, équilibre national et équilibre personnel. À eux de définir le cadre dans lequel la finance et les milieux industriels trouveront matière à satisfaire leurs appétits sans nuire à l’intérêt général. Que dis-je ! En servant l’intérêt général. Cela s’appelle : la réglementation ; mais une réglementation qui ne tue pas dans l’œuf la nécessaire confiance, du producteur au consommateur via le transformateur.

    Combien de tours de table faudra-t-il encore pour que les règles de l’organisation mondiale du commerce finissent par rendre la mondialisation plus vertueuse ? Car, que cela nous plaise ou non, la mondialisation est un phénomène irréversible. Il nous faudra continuer de faire avec.

    Sauf à vouloir se mettre des œillères, c’est-à-dire adhérer à cette conception simpliste que nous propose des européens nationalistes selon laquelle nous pouvons relever les défis du futur proche qu’en puisant dans nos seuls ressources et savoir-faire, la mondialisation continuera à s’imposer dans notre quotidien. Une Europe telle que ces partis viscéralement europhobes la conçoive ferait de chaque pays membres une proie facile, d’autant plus qu’ils en viendraient très vite à se chamailler entre eux, n’étant d’accord que sur point : leur détestation des étrangers, tout particulièrement ceux en provenance de l’hémisphère sud.

    J’ai en mémoire ce copain de régiment, fils d’agriculteur, qui souvent, même pendant nos tours de garde à l’entrée de l’ancienne base américaine, aimait me parler de son futur métier. Je n’y connaissais rien ou si peu en agriculture, mais le nom de Massey-Ferguson circule toujours dans les neurones. Le tout nouveau tracteur familial portant cette marque aux consonnances anglo-américaines était visiblement source de fierté. Alors que la France Gaulienne s’apprêtait à tourner le dos à l’OTAN, ses agriculteurs commençaient à recueillir les fruits de la récente implantation d’une société américaine spécialisée dans le machinisme agricole, installée à Beauvais en 1960. Le siège central de Massey-Ferguson, aujourd’hui AGCO Massey Ferguson, est à Duluth en Georgie et cette usine de Beauvais rayonne en Europe. C’est aussi cela la France.

    Bien évidemment, cela ne nous dédouane en rien de cette nécessité qu’il y a à redynamiser notre tissu industriel, en sachant épouser les bons vents de l’innovation…et de la recherche ; pour que l’on puisse espérer, dans un avenir pas trop lointain, déguster, sans problème de conscience, un fruit venu d’ailleurs, en sachant que l’ouvrier agricole de ce pays lointain est sorti de la misère, et sans que cela pénalise le propriétaire du verger d’à côté. La quadrature du cercle !

    Thé, café ou chocolat ? Toute réflexion faîte, on pourrait se passer de ces saveurs et ne se contenter que d’un verre d’eau ; l’eau c’est la vie. Encore faut-il qu’elle ne soit pas source de danger pour notre santé. Là aussi, grande source de réflexions à mener, sans qu’il soit nécessaire de recourir aux anathèmes.

    Thé, café ou chocolat ? Que cette réflexion du jour n’ajoute pas un fond d’amertume dans votre boisson préférée. Pour ma part, je ne mets plus de sucre dans mon café depuis je ne sais plus combien de temps ; j’en savoure d’autant mieux l’arôme, mais le sucre à l’art de se nicher un peu partout.

    Entre sel et sucre, trouver le bon dosage.

    Finalement, une règle de vie.

     

                                                                                                                                 Claude Tarin

                                                                                                                      Jeudi 7 mars 2024


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