• Le Grand Echiquier

    Ce mardi, je constate que vous ne vous êtes pas tous, loin s’en faut, précipités sur vos calculettes pour valider ou infirmer le résultat du problème abracadabrantesque que j’ai posé dans une précédente chronique (A défaut de pouvoir partir en goguette). Si cela vous a échappé, je résume.

     Il s’agissait de savoir à combien de géniteurs potentiels je devais d’être ce que je suis, à compter du début de notre ère, c’est-à-dire depuis ces vingt derniers siècles. Le correctif que je redoutais, celui de l’expertise de Claudie Missenard,  m’est arrivé, sans que j’en sois totalement surpris. Il m’a, plusieurs heures durant, fait rougir de honte. Tous calculs faits, je dénombrais 151 115 710 674 612 646 838 272 géniteurs, hommes femmes confondus. Ceux de Claudie portaient la barre, dans un premier temps, à 1 208 923 839 289 302 942 150 756, puis après vérification à 1 208 925 819 614 629 174 706 176. 

    Je vous épargne la relecture de ces chiffres impossibles à énumérer.  Là où, en arrondissant, je totalisais 150 suivi de 21 zéros, Claudie portait le résultat à 1200, suivi également de 21 zéros. Bref ! Me voici avec plus d’un zéro pointé. J’ai donc dû vérifier et refaire, une à une, mes multiplications par deux. Mais, finalement,  pour en arriver au même différentiel à quelques unités prés. Il m’aura fallu une longue nuit de sommeil réparateur pour trouver la clef de ce mystère.

    Vous suivez ? Ne décrochez pas ! C’est on ne peut plus clair.

     

    Loi des grands nombres et consanguinité

     

    Dans mon calcul, je n’intégrais pas deux générations du XXe siècle. Pour la raison suivante : né au sortir de la Seconde Guerre mondiale, seules les étreintes de mes parents et de mes quatre grand parents devaient être prises en compte pour ce siècle. S’y ajoutait une troisième génération non comptabilisée. Or, dans ses calculs, Claudie a pris, quant à elle, la totalité des vingt siècles, soit 4 x 20 générations. Ouf ! Je pouvais retrouver des couleurs moins sanguines.

    Autre réaction qui m’a fait douter également de la justesse de mon raisonnement, celle de Michel Méar.  Selon lui, mes calculs ne prenaient pas en compte la consanguinité qui a longtemps  été incontournable. Mais le doute s’est vite dissipé pour la simple raison qu’il ne s’agissait pas pour moi de déterminer la nature même de mes lointains ancêtres, mais tout simplement les passages à l’acte à l’issue duquel on devient fœtus. Pour autant, il m’est impossible, tout comme vous, de prétendre avoir eu autant d’ancêtre

    On estime que 80 à 106 milliards d'être humains sont nés depuis l'origine de l'humanité. Il y a 500 000 ans, notre planète comptait moins d'un demi-million d'habitants. A la naissance de l'agriculture, environ 8 000 ans avant Jésus-Christ, la population mondiale se situait aux alentours de 5 millions. Au début de notre ère la fourchette allait de 40 millions à 89 millions. Cherchez l’erreur ?

    Comme le souligne Michel Méar  « la probabilité de retrouver plusieurs fois le même ancêtre dans les 4 ou 5 premières générations est assez rare, il n'en est pas de même dans les générations antérieures. »

    Bien évidemment il ne me serait pas indifférent de savoir si un ou une de ces ancêtres a un lien de parenté avec Clovis, Jeanne d’Arc, Louis XI ou le Roi Soleil. Avec Jésus-Christ, l’affaire semble entendue. Mais, et je pense que vous serez d’accord avec moi, vous qui avez fait l’effort de me suivre jusqu’ici, qu’il n’y a pas besoin d’avoir du sang bleu pour se prévaloir d’une noble lignée.

    Nombre de celles et ceux qui me lisent partagent ce tire de noblesse qui nous vaut d’ajouter à notre patronyme un « de Kermouster », assorti, qui plus est, d’un « de Lézardrieux ». Idem pour Michel qui lui relève désormais de la lignée « de Pleumeur-Gautier ».

     

    Le Grand Echiquier

     

    Mais c’est le commentaire apporté par mon fils aîné, qui m’offre l’opportunité  de souligner l’incongruité de nos querelles intestines telles qu’elles ne vont pas manquer de ressurgir après la présentation par Edouard Philippe, ce mardi après midi, du plan de sortie progressive du confinement à partir du 11 mai prochain si, comme l'a souligné avec force le Premier ministre « les indicateurs le permettent. »

    Erwan a, suite à cette chronique abracadabrantesque, fait le parallèle avec la légende de Sissa. N’étant pas connaisseur ni joueur d’échecs, je découvrais.

    Selon cette légende, Sissa, l’inventeur du jeu d’échecs, 3000 ans avant Jésus-Christ, aurait cherché à monnayer le prix de sa trouvaille auprès d’un roi des Indes, le roi Belkib. En son équivalent de grains de riz. Devant le roi, Sissa expliqua la méthode qu’il convenait de prendre pour parvenir à exhausser son souhait : un grain de riz, sur la première case, deux grains de riz dur la deuxième, quatre sur la troisième, huit sur la suivante, etc. Le roi Belkib y vit là une aubaine pour obtenir des droits à pas cher, puisque le jeu d’échecs ne contient que 64 cases.

    Hélas, pour lui, il lui faudra déchanter car sur la 64e case le nombre de grains de riz était sans commune mesure avec les possibilités du royaume. Et pour cause cela représentait plus de 9 milliards de grains, ce qui, rapporté à l’ensemble des cases de l’échiquier, portait ce nombre à plus de 18 milliards de grains. Chaque grain de riz pesant environ 0,04 g, ce sont pas moins de 720 000 millions de tonnes qu’il aurait fallu verser sur l’échiquier.

     

    Le Grand Echiquier

     

    La production mondiale de riz tournant, bon an mal an,  autour des 500 millions de tonnes, il faudrait près de mille quatre cents ans de production pour honorer, comme il se doit, le sage Sissa.

    Mais comment dès lors ne pas revenir à cette problématique du moment qui dépasse nos atermoiements nationaux

    Sur le grand échiquier des échanges internationaux, le riz est une matière de première nécessité pour de nombreux pays, à commencer par l’Afrique. Or, et c’est là une des conséquences de la pandémie, les tensions se font de plus en plus vives sur ce segment de marché. Les pays asiatiques, dont la Chine, sont les principaux producteurs de riz. Les pays africains craignent que dans les semaines et dans les mois à venir de ne plus pouvoir s’approvisionner, leur pouvoir d’achat étant une victime collatérale du coronavirus.

    Certes notre priorité du jour consiste à se préoccuper de notre propre sort. Il convient d’avancer nos propres pions sur le grand échiquier. Du discours du Premier ministre, je retiens cette image d’une ligne de crête sur laquelle il nous faut avancer pour ne pas tomber, soit dans une crise sanitaire aggravée, soit dans une dépression économique incommensurable.

    Pour trouver le point d’équilibre, et qui sait retrouver la confiance, il en appelle au civisme de tous, c’est-à-dire à notre propre responsabilité. Tout manquement aux règles des gestes barrières pourraient avoir de terribles conséquences. Nous savons déjà que sur la mosaïque humaine le virus peut, telle multiplication des grains de riz,  avoir des conséquences désastreuses. Sa puissance est exponentielle. Et cela concerne plusieurs milliards de personnes. Nous, nous ne sommes que 66 millions.

    Donc vigilance de tous les instants sur ce chemin de crête, qu’il nous faut suivre impérativement. Mais en n’oubliant jamais que nous ne sommes pas le seul pays dans la tourmente. Nous faisons encore partie de ceux qui sont les mieux lotis. Nous pouvons  encore facilement nous procurer notre paquet de riz hebdomadaire.

    Rendons fiers nos ancêtres, même si certains n'honorent pas la lignée ! Ayons la noblesse du cœur !

     

                                                                                                                              Claude Tarin

                                                                                                                Mardi 28 avril 2020

     

     

    Haïku du 43 «  jour

     

    Le Grand Echiquier

     

    Grive apeurée

    Au pied de son arbre-

    Retour du soleil

     

    Le Grand Echiquier

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  • Commentaires

    1
    Claudine
    Mardi 28 Avril 2020 à 17:54
    Mouster n’avait pas enfreint les règles du Confinement.....notre chat a été attaqué dans notre jardin . Nous avions entendu vendredi soir d’horribles miaulements. On pensait que c’était d’autres chats. Nous l’avons retrouvé dimanchysoir bien amoché. Le vétérinaire a découvert 3 grosses marques de crocs ou de serres de rapace. Vilain ! 8 jours d’antibiotiques et personne ne saura qui fut l’agresseur. Claudine
    2
    Claudie
    Mercredi 29 Avril 2020 à 14:20

    Claude ayant commencé à s'y intéresser, je proposerai - une fois déconfinés - une petite causerie mathématique sur les puissances de 2. Sujet passionnant s'il en est. Comme les rassemblements de plus de 5000 personnes seront interdits tout l'été et que je ne doute pas que le sujet attire les foules, il nous faudra sans doute attendre l'automne. Mais vous ne perdrez rien pour attendre, n'est-ce pas, Elizabeth ?

    3
    Elisabeth
    Mercredi 29 Avril 2020 à 20:49

    Ok, Claudie pour les puissances de 2 !

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