• Sur le chemin de l’école : Claudie Asselain / Missenard

     

    Le 1er août dernier, Claudie Asselain / Missenard se décidait (enfin !) à sortir du ‘frigo’, où elle le conservait depuis quatre ou cinq ans, un écrit définissant le Kermoustérien*.  En plein cœur d’un été perturbé par la tempête Covid 19, Claudie y aura vu le moyen de contourner une déception largement partagée : l’annulation du traditionnel pique-nique qui, depuis plusieurs années, permettait à tous les résidents du hameau de se rassembler, en cette période de l’été, sur le terrain dont elle est propriétaire. Un grand moment de « communion »…entre Kermoustériens, avec le Ferlas en toile de fond.

    Malgré les relâchements autorisés après plusieurs mois de confinement, les responsables de l’Amicale, avaient, fort justement, décidé d’annuler ce rendez-vous annuel. On n’est jamais trop prudent ! Remettant à l’été prochain le plaisir pour chacun de se sentir Kermoustérien parmi les Kermoustériens. Relisez ce texte* ! C’est un vaccin contre la morosité.

    Ce texte se nourrit d’un long vécu, puisque Claudie la Parisienne peut se targuer d’avoir derrière elle plus de soixante ans de présence à Kermouster. C’est ici que ses parents, dans le sillage de familles amies, elles aussi parisiennes, ont décidé, au début des années 50, de venir se ressourcer chaque été. Nul ne peut donc mettre en doute son entière légitimité à définir ce qu’est un Kermoustérien et à prendre toute sa place dans l’histoire de son village d’adoption.

    Ce n’est donc pas sur les bancs de l’ancienne école que Claudie s’est forgé cette double identité, mais dans le creuset des vacances partagées avec les enfants de son âge, ces copains et copines d’ici avec qui elle  partage aujourd’hui, tout comme son frère Bernard, tant de souvenirs impérissables.

    Les vacances sont des espaces temps qui donnent du rythme à toute scolarité. Pour tout village, ce n’est en rien un temps mort. Surtout quand pointe le temps des récoltes et de la moisson.  Sur ce chemin de l’école que nous suivons depuis plusieurs jours, le récit de Claudie Asselain / Missenard s’avère être un temps de « récréation prolongée», puisque son regard porte sur toute la décennie de ses années d’insouciance. Vous n’allez pouvoir qu’apprécier ce regard extérieur vécu de l’intérieur.

    Demain, nous reprendrons la marche. Il nous reste encore quelques souvenirs d’anciens élèves à découvrir pour atteindre le point final de cette histoire dont on n’imagine pas encore qu’elle puisse avoir une fin.   

     

                                                                                                                     C.T.

                                                                                                   Jeudi 3 décembre 2020

     

    * Qu’est-ce qu’un Kermoustérien ?

     

     

    « Une incroyable parenthèse de joyeuse liberté »

     

    Sur le chemin de l’école : Claudie Asselain / Missenard

     

    En ce temps-là (en gros, de 1955 à 1965), la France était un pays rural et l’Éducation Nationale libérait la jeunesse les trois mois d’été, afin qu’elle puisse aider aux travaux des champs. Les enfants, nombreux à l’époque à Kermouster, ne quittaient guère leur village. Les petits parisiens que nous étions les rejoignions tous les étés avec bonheur. C’était pour nous une incroyable parenthèse de joyeuse liberté.  Il faut s’imaginer un village quasiment sans voitures (à notre arrivée, la route venant de la chapelle n’était pas goudronnée au-delà de l’école), des maisons sans clés, et une troupe d’enfants en liberté.

     

    Les jeux

     

    Sur le chemin de l’école : Claudie Asselain / Missenard

    L'école et son préau vue du terrain de la famille Israël Asselain 

     

    Le champ - c’est ainsi que nous appelions le terrain de mes parents en face de l’école - nous servait de lieu de rassemblement. Bordé alors d’un mur en parpaings, il comportait une partie cultivée et une partie herbeuse entourée de pins (tous tombés lors de la tempête de l’automne1987). Il abritait nos parties endiablées de chandelle, cache-cache et autres jeux. Plus tard, on y installa la table de ping-pong sur laquelle se déroulait des parties endiablées de ping-pong tournant. 

     

    Sur le chemin de l’école : Claudie Asselain / Missenard

     De gauche à droite : Germaine Le Boubennec, Jeannie Le Boubennec, Chantal Le Boubennec, Éliane Le Moullec, Bernard Asselain 

     

    Ce terrain fut le théâtre de réjouissances, voire de spectacles ouverts à la population, notamment certains 14 Juillet où Monsieur Le Grégeois se transformait en artificier amateur,  pour tirer un généreux lot de fusées devant les Kermoustériens venus en nombre.

    Nous courions  dans les chemins au cours de grands jeux de pistes. On se répartissait en deux équipes (paillefoin…), l’une poursuivant l’autre, qui indiquait le tracé à suivre à l’aide de flèches dessinées à la craie et de messages à découvrir. Et sur la route devant l’école se déroulaient d’interminables parties de balle au prisonnier.

     Les jours de pluie, toute une troupe se retrouvait devant la télévision chez Louise Le Moullec qui avait été une des premières maisons, avec celle d’Ernest et Andréa Perrot, à avoir “un râteau sur le toit”. On regardait avec passion Zorro, on partageait les mêmes émotions devant Intervilles. Et le soir, on allait voler des pommes chez Hertzog (il y a prescription).

     

     

    La grève

     

    Sur le chemin de l’école : Claudie Asselain / Missenard

      1955 : Claudie Asselain à Dinan Prat, grève de Goas Luguen,  avec sa bouée

     

    Nous descendions nous baigner à la grève, en empruntant le chemin qui partait à droite du lavoir. Nos baignades n’étaient guère surveillées, ni combinaisons, ni brassards, parfois une vieille chambre à air qui servait de grosse bouée. Mais attention, il y avait un impératif à respecter scrupuleusement: interdiction de se baigner durant les 3 heures de digestion, si minime que soit l’aliment à digérer…

    À midi et à 19 heures, la cloche de la chapelle, vigoureusement actionnée par Tine Bourdon, nous rappelait qu’il était temps de rentrer à la maison. On rinçait au passage nos maillots dans l’eau douce de la petite fontaine dont les abords avaient été joliment dégagés par Yves Corlouër.

    Quand on descendait à l’Ile à Bois, la vieille vedette blanche qui terminait sa vie sur la droite, en haut de la grève, était le quartier général de nos lents après midi  à attendre ensemble que la mer monte. Les tempêtes d’hiver ont eu peu à peu raison de sa carcasse.

     

    Sur le chemin de l’école : Claudie Asselain / Missenard

     Assis de gauche à droite :

    Au premier plan, Jean-Yves Le Moullec et son chien Tintin, sa sœur Eliane, sa sœur Fabienne, Claudie Asselain, Maudez Le Boubennec

    Au deuxième plan, Josianne Thépault, Charlotte Le Merrer, Fabienne Blondel, Gilbert Thépault.

    Debout, de gauche à droite :

    Dominique Blondel, Chantal Le Boubennec, Bernard Asselain, Fabienne Marino, Germaine Le Boubennec.

     

     

     

    Les Zaricots

     

    Sur le chemin de l’école : Claudie Asselain / Missenard

    Au premier plan, à gauche  : Claudie Asselain, Jeannie Le Boubennec, Chantal Le Boubennec, Eliane Le  Moullec, A droite, avec sa chemise à carreaux, Jean Le Moullec et derrière son épouse Louise. À l’arrière plan, au centre, Jean Pierre Le Boubennec et son frère Maudez

     

    Fin août revenait l’époque des cocos. Point de main d’œuvre venue des pays de l’est. Mais de grands tas de plants de haricots, déposés en divers coins du village par les agriculteurs. Du matin au soir, enfants comme adultes, on faisait les zaricots. Maintenant on appelle ça plumer les cocos.

     L’ambiance était excellente, quoique laborieuse. Assis en rond, nous laissions les langues aller bon train, au son des chansons yéyé que nous distillait le transistor (une technologie toute récente!). Et le soir, Ernest et sa balance passaient peser les sacs et nous annoncer le revenu du travail du jour. Revenu que nous, les enfants comptions bien dépenser au Pardon.

     

    Le Pardon

     

    Sur le chemin de l’école : Claudie Asselain / Missenard

     

    Le Pardon, premier dimanche de septembre, clôturait l’été. Grand événement pour nous et nos copains, tant dans sa partie religieuse que dans sa partie profane. Terrible déception certaines années où nous étions déjà repartis en ville avant le jour J. La messe, les dames en coiffe, la procession avec la Sainte Vierge portée par les jeunes filles et l’ex-voto de la Marya portée par les jeunes gens en tenue de marin, les vêpres, tout revêtait une solennité désormais perdue. Des marchands de vêtements et de chaussures dépliaient leurs étals devant chez Andréa.

     

    Sur le chemin de l’école : Claudie Asselain / Missenard

     

    Sur le chemin de l’école : Claudie Asselain / Missenard

     

    La partie profane était bien entendu ce qui nous plaisa le plus. Le casse-pot avait beaucoup de succès auprès des costauds. Qui, dans notre siècle sécuritaire, envisagerait encore donner un grand coup de bâton sur un pot en terre pour se prendre une boite de conserve tombée d’en-haut sur le coin de la figure ?

    Pour les enfants la course en sac ou le concours de grimaces rythmaient l’après-midi. Et bien sûr, il y avait bal… Pour nous, c’était la fin d’un bel été. Nous n’étions pas conscients que c’était aussi la fin d’une époque.

    Avec tout ça, je me suis éloignée de Ti skol.  Mais, voyez-vous, si Charlemagne n’avait pas eu cette idée folle d’inventer l’école, il n’y aurait pas eu les belles vacances que je viens d’évoquer. Nostalgie, quand tu nous tiens…

    Et vous comprendrez aussi pourquoi je trouve si réjouissantes les grandes bandes de copains et de cousins, enfants et adolescents qui redonnent vie au village quand revient le temps de l’été à Kermouster.

     

                                                                                                Claudie Asselain / Missenard

     

    Pour suivre : 

     

    Sur le chemin de l’école : Nicole Toullic / Guillou

     

    Précédemment : 

     

    Sur le chemin de l'école: Pascal Perrot

     

    Sur le chemin de l'école: Dominique Le Bleiz

     

    Sur le chemin de l'école: Yvon Perrot

     

    Sur le chemin de l'école: Marie-Hélène Baibled / Costiou

     

    Sur le chemin de l'école: Jean-Pierre Le Dantec

     

    Sur le chemin de l'école: Yvon Corlouer

     

    Sur le chemin de l'école: Michel Le Troadec

     

    Sur le chemin de l’école : Marie Françoise Séguillon

     

     Sur le chemin de l'école: Michel Le Cam

     

    Sur le chemin de l'école: Marie-Claire Beauverger / Pochat

     

    Sur le chemin de l'école: Marie Françoise Arzul / Parenthoën

     

    Sur le chemin de l’école : Jean Bourdon  

      

    Sur le chemin de l'école : Huguette Arzul / Le Berre

     

    Sur le chemin de l’école : Marie Anne Beauverger / Ernault 

      

    Sur le chemin de l’école : Rosalie Le Blouch / Le Lay 

     

    Sur le chemin de l'école : Ernest Lavisse 

     

    Sur le chemin de l'école : Mathurin Boscher 

     

    Sur le chemin de l’école : Isabelle Marrec 

     

     Sur le chemin de l’école 

      

    Le Kermouster d’Yves Saindrenan 

      

    Adieu Monsieur…l’Instituteur!   

     


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