• Le passé, la légende, l’avenir

    Journée historique ? N’abusons pas des superlatifs ! Mais il n’est pas faux d’écrire que Kermouster aura vécu un jour de transition en ce dimanche 31 mars, avec l’ouverture officielle de la crêperie en lieu et place de La Cambuse, cent dix ans, jour pour jour, après l’ouverture de ce qui fut d’abord une école. Un double événement en quelque sorte, avec en prime un soleil radieux associé à une brise de nord-est soutenue tout au long de la journée. Rafraîchissante certes, mais pas au point de dissuader les gens de s’asseoir aux tables de l’ancienne cour d’école requinquée en terrasse avec vue sur mer (voir précédents billets).

    Pour marquer le cent dixième anniversaire de l’ex-école, des Kermoustériens ont, en effet, pris l’initiative de faire sonner la cloche de la chapelle. La foule n’était pas au rendez-vous, le passage à l’heure d’été durant la nuit pouvant expliquer des retards à l’allumage, mais chacun savait à l’avance que, de chez lui, il serait le témoin auditif de cette commémoration.

    Le passé, la légende, l’avenir

    Il nous est déjà arrivé d’écrire que c’est tout un art de faire sonner une cloche. Cela l’est d’autant plus quand l’on vous impose un nombre précis de sonneries. Désormais, c’est à l’ami Jean-Pierre que revient le plus souvent le devoir de tirer sur la corde. Mais il est certainement plus facile d’apprendre à parler breton que de maîtriser totalement la mise en mouvement de la cloche. Bref ! Le défi qu’on lui avait imposé relevait de mission impossible. Combien de fois la cloche aura-t-elle fait entendre sa voix ? Plus de 110 fois assurément. Il ne s’est trouvé personne pour nous donner le chiffre exact, même parmi ceux qui, présents, ont compté au rythme de la cloche. Mais était-ce là l’essentiel ? Bien sûr que non. Il fallait marquer le coup. Il n’est pas inutile de « baliser » le passé.

    Avec la crêperie, qui prend ainsi le relais du café épicerie, l’histoire s’écrit au présent et se projette dans l’avenir. Jusque la fin d’après-midi, scotchés dans leur remorque « street food »,  Krystel Le Moal, à la galettière, et Benjamin Charpentier, à la caisse, ont fait face à une affluence soutenue.

    Le passé, la légende, l’avenir

    Evidemment, toutes celles et ceux qui jettent un œil sur ce blog, m’attendent au virage. « Alors ? Tes impressions ? ». Au risque de les décevoir, je n’ai pas vocation à jouer les critiques gastronomiques. Je me vois mal mettre les pieds dans le plat, si je puis m’exprimer ainsi. Le trait de plume qui s’amuse à traduire de multiples ressentis en bouche a toute chance de mettre à côté de la plaque.

    On ne le dira jamais assez, les métiers de la restauration sont des métiers difficiles, à risque quotidien. Il faut sans cesse veiller à ce que le client soit satisfait, au rapport qualité prix. Ce qui est valable pour la quiétude des propriétaires de gîtes (notre précédent billet) l’est encore plus pour celles et ceux qui souhaitent nous voir à leurs tables. Un tweet, un message sur Face book  peuvent faire plus rapidement du mal que le traditionnel téléphone arabe.

    Donc je fais l’impasse sur les considérations gustatives. Mais je ne m’interdis pas de traduire un sentiment. Tout personnel, cela va de soi.

    Le passé, la légende, l’avenir

    Pour parler de la crêperie Breiz Colibri, c’est sa raison sociale, il me semble de bon ton d’user de la métaphore de la greffe. Depuis plusieurs mois, le coeur du village avait cessé de battre. La relance d’un commerce vient de le réactiver.

    Donc hier, nous ne pouvions que nous réjouir. Le challenge que Krystel et Benjamin ont décidé de relever n’est pas mince. Cette première journée ne peut que leur avoir donné du baume au cœur après de longues semaines passées à préparer ce rendez-vous. Mais le savent-ils ? Pas sûr, bien qu’ayant des attaches en Presqu’île. Kermouster « ce n’est pas de la tarte !».

    Plagiant le slogan du brasseur qui s’affiche désormais sur la devanture de La Cambuse, telle une armoirie d'un preux chevalier, ils sont entrés de plain-pied dans la légende. Celle qui colle à la peau de ce village depuis un temps lointain. Il va leur falloir faire avec.

    Il est effectivement bien loin le temps où les petits Kermoustériens s’en allaient écouter la bonne parole lors des séances de catéchèse dans les paroisses environnantes. A cette époque, les anciens nous l’ont souvent rappelé, Kermouster avait une triste réputation : « Petit village habité par des sauvages ». Plus récemment, c’est un autre sparadrap qui s’est posé sur le hameau : « Kermouster ?  Village gaulois. » Evidemment, on fait tout de suite le parallèle avec Astérix et Obélix, ce qui, soit dit en passant, n’est pas pour nous déplaire. Mais pourquoi une telle réputation ? Parce qu’ici, plus qu’ailleurs, selon la rumeur, nous serions râleurs, « jamais contents ». Allons donc ! Restons sérieux ! Les gens d’ici n’ont qu’un seul souhait : que Kermouster conserve ce point d’équilibre entre renouveau et authenticité.

    En décidant de donner un second souffle à leur carrière à Kermouster, les nouveaux gérants de La Cambuse ont d’abord pensé que le cadre était un atout majeur. Ce n’est pas nous qui les contredirons. Le panorama qui s’ouvre devant l’ancienne école vaut assurément le détour. On ne s’en lasse pas ! Mais cela ne peut bien évidemment pas suffire à éviter le rejet au greffon.

    Il est évident que la récompense des efforts engagés dans cette affaire repose sur plusieurs paramètres, à commencer par celui qui consiste à faire venir une clientèle extérieure au village. Ce dimanche, nous en avons eu un premier aperçu. La promotion a joué. Et c’est très bien. A ceci près, que les contraintes demeurent.

    Le passé, la légende, l’avenir

    Je ne parle pas du supposé caractère de cochon des Kermoustériens. Par contraintes, il faut entendre l’exiguïté du lieu. Malgré les toutes fraîches lignes blanches, qui vont nous appeler à plus de discipline, la place du Crec’h était, en cet après-midi dominical, au bord de l’asphyxie.  Dans ce « mouchoir de poche » il ne faudrait pas que des esprits deviennent chagrins. La bonne composition des riverains ne doit pas souffrir de comportements abusifs. Faudra-t-il que la maréchaussée s’en vienne mettre son grain de sel pour en appeler au plus élémentaire civisme ? Ce serait nuire bien évidemment à l’intérêt général et à l’intérêt particulier des nouveaux gérants de La Cambuse.

    Je crois, pour conclure,  qu’il est bon d’insister sur ce qui caractérise le mieux l’esprit des lieux : le goût pour l’authenticité. Pour que l’osmose soit totale, postulat incontournable d’une réussite sur le long terme, il faut que La Cambuse retrouve pleinement le bon rythme cardiaque. Pour l’heure, il lui faut faire avec du transitoire. La remorque « street food » s’en ira un jour sous d’autres horizons. En lieu et place de ce qui était d’abord un préau puis un café épicerie, le Breiz Colibri pourra alors jouer sur toute la palette des services. Au pays de maître corbeau et de maître goéland, nous n’en doutons pas, ses premiers battements d’ailes lui auront permis de prendre toute la mesure du territoire sur lequel il entend assurer son avenir. Le cœur doit faire corps avec le village. C’est une loi naturelle.  

    Le passé, la légende, l’avenir

    Le passé, la légende, l’avenir


  • Commentaires

    1
    hallot Monique
    Mercredi 17 Avril 2019 à 22:04

    Comment les gens ont-ils été informés de l'inauguration ? J'aurais bien voulu y participer. Une sonnerie de cloches ne signifie pas forcément "tous à La Cambuse"

      • Mercredi 17 Avril 2019 à 22:18

        Bonjour Monique

        Dans de précédents écrits j'avais indiqué que les nouveaux gérants de La Cambuse avaient choisi d'ouvrir la crêperie le jour même du 110e anniversaire de ce qui fut d'abord une école. Une ouverture commerciale, sans autre forme de formalités. Rien de spécifique à destination des Kermoustériens. La presse avait, quant à elle, annoncé l'ouverture. Il convient de rappeler que Krystel Le Moal et Benjamin Charpentier avaient eu la courtoisie de "régaler grâcieusement" les habitants du hameau lors du traditionnel goûter de décembre dernier organisé par l'Amicale (chronique du 19 décembre). A cette occasion ils s'étaient présentés.  

    2
    Monique HALLOT
    Samedi 20 Avril 2019 à 18:48

    Bonjour Claude. Comme je ne lis pas tous tes écrits ni la presse, je ne savais pas que c'était le 110 anniversaire de l'école. Certes l'ouverture était annoncée, mais comment savoir qu'il fallait y aller? Bref....

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