• L'automne ne sera pas que sanglots

     

              Les sanglots longs

    Des violons 

    De l’automne 

    Blessent mon cœur 

    D’une langueur 

    Monotone.

    Tout suffocant 

    Et blême, quand 

    Sonne l'heure, 

    Je me souviens 

    Des jours anciens 

    Et je pleure ; 

    Et je m'en vais 

    Au vent mauvais 

    Qui m'emporte 

    Deçà, delà, 

    Pareil à la 

    Feuille morte.

     

                                                                                                 Paul Verlaine 

                                                                                       Poèmes saturniens (1866) 

     

     

                                                                                                                                                                 (Photo Nicole Guillien)

     

    Il ne vous a pas échappé que ce mardi 22 septembre, nous avons changé de saison, même si, comme nous le montre cette belle photo prise en fin de matinée, cela ne saute pas aux yeux. Une transition qui ne sera marquée que par un fléchissement des températures, un vent plus généreux pour le week-end selon Météo France, mais sans grand  chambardement dans la couleur du ciel. Si j’en viens à placer  en préambule ce beau texte de Verlaine, dans sa version originale, ce n’est pas pour vous saper le moral en ajoutant une couche de spleen à l’anxiété du temps présent. Ni, d’ailleurs, pour prendre position dans le débat qui agite le monde des intellectuels, débat qui porte sur l’entrée ou non au Panthéon de Verlaine et de Rimbaud.

    Quand il s’agit d’honorer des morts, je m’interroge toujours sur ce qu’ils en auraient pensé eux-mêmes. Est-ce une telle reconnaissance que ces deux poètes « maudits » auraient revendiquée pour eux-mêmes ? N’ayant, pas plus que d’autres, la capacité à faire parler les morts, je m’en tiens simplement à ce que la lecture de leur œuvre m’apporte. Et ce poème, parmi tant d’autres, a et conservera, pour moi, une résonance particulière à laquelle un transfert sous la coupole du Panthéon ne changerait pas grand chose. Même quand il m’arrive de prendre le sillage d’un Charles Trenet qui, en 1939, s’est emparé de ce poème pour en en faire une chanson, avec pour seule altération : « bercent mon cœur ».

    C’est d’ailleurs cette strophe remaniée ainsi qui traduit le mieux le sentiment du jour. Ce mardi il aura fait bon, en effet,  se laisser bercer par la douceur et la quiétude de ce premier jour de l’automne. Certes, je n’oublie pas les effets sur notre moral du temps qu’il fait, mais l’automne est une saison qui mérite d’être savourée pleinement. Et le cadre de vie qui est le nôtre nous y aide grandement. A la réserve près que celui que nous allons vivre,  ces prochaines semaines, va prendre une tonalité particulière, toute en gravité, pour cause de pandémie.

    Sans être devins, nous pressentions tous, bien avant ce jour, que les prochains mois vont pour des millions de Français et des milliards de Terriens être vécus dans les affres de l’angoisse. A la courbe grimpante des victimes du Covid 19 s’ajoute celles des statistiques de mise en chômage et de fermeture d’entreprises. Evitera-t-on un confinement total comme cela fut le cas au début de l’année ? Il nous faut l’espérer. Comme il est à espérer que d’ici le 21 février 2021 l’on puisse bénéficier d’un vaccin contre ce coronavirus que le pangolin, peut-être à tort, est soupçonné de nous avoir transmis.

    Comme le révèle ce logo, ce mammifère insectivore à la carapace d’écailles fait l’objet d’une attention mondiale. Non pas parce qu’il est supposé être celui qui s’est vengé de l’humanité, comme vient de l’écrire le philosophe Michel Onfray dans un nouvel essai tout aussi pamphlétaire que bien d’autres de ses écrits (La vengeance du Pangolin, Rd. Robert Laffont), mais parce qu’il s’agit d’une espèce menacée.

    Tout comme vous peut-être, je n’ai guère fait attention à la tenue, le 20 février dernier, de la journée mondiale du pangolin. Ai-je été, ce jour là, plus sensible au thème de la justice sociale à laquelle on nous appelait, également sur le plan mondial, à nous associer. Je ne mettrais pas ma main au feu quoique préoccupé par cette question. Mais pour m’en tenir au pangolin, cet animal bénéficie, chaque année, le troisième samedi de février, donc bien avant l’apparition du Covid 19,  d’un coup de projecteur. Une Journée mondiale sous l’égide de l’Organisation des Nations Unies qui entend lutter contre le commerce illégal d’espèces sauvages.

    Ayant découvert cela, j’ai poussé la curiosité, ce mardi matin, à faire l’inventaire de ces Journées où nous les humains sommes susceptibles d’être au coude à coude. Je vous en livre quelques résultats.

    Si l’année compte 365 jours, on dénombre 564 Journées mondiales, internationales ou européennes, pour cette année 2020. Ce qui sous-entend qu’il y a des jours où il nous aurait fallu être et demeurer attentifs à plusieurs sollicitations. 

    Il y a des mois plus chargés que d’autres. Et ce mois d’octobre s’avère être celui qui regroupe le plus grand nombre de Journées de ce type : 77 au total

    Mais c’est au mois de mars que l’on trouve les jours les plus « chargées » en Journées. Les 20 et 21 mars derniers, nous étions conviés, deux jours de suite, à participer à 8 événements. Je vous en livre le détail :

    20 mars :Semaine internationale pour les alternatives aux pesticides ; Journée mondiale du moineau ; Journée internationale du macaron ; Journée mondiale de la santé bucco-dentaire ; Journée mondiale du bonheur ; Journée mondiale du Conte ; Journée internationale sans viande ; Journée(s) internationale(s) du livre voyageur.

    21 mars : Journée mondiale de la Trisomie 21; Journée mondiale de la Poésie ; Journée internationale de Novruz, la fête du printemps plus que millénaire dans de nombreux pays ; Journée mondiale de la marionnette ; Journée européenne de la musique ancienne ; Journée mondiale du rangement de bureaux ; Journée Internationale pour l'élimination de la discrimination raciale ; Journée Internationale des forêts.

    Je vous laisse apprécier le casse-tête de ces deux regroupements successifs. Mais il est vrai que tout cela nous a complètement échappé, car les 20 et 21 mars derniers, soit trois jours après la mise en confinement, nous avions, à notre corps défendant, la tête ailleurs.

    Dans ce calendrier annuel des Journées mondiales, on ne compte pas le nombre de télescopages plus ou moins étranges entre des thématiques. Ainsi le 1er octobre prochain nous sommes conviés à penser à la musique, au café, au chocolat et à l’urticaire. Il faudra certainement faire un choix. Mais bon, un morceau de chocolat pour accompagner le petit café d’après déjeuner, cela ne heurte pas l’entendement.

    On pourrait multiplier les exemples de ce type, mais je soumets à votre réflexion ce télescopage de ce dimanche 27 septembre, entre la Journée mondiale du tourisme et la Journée mondiale du migrant et du réfugié.

     

     Etreinte maternelle. Autoportrait d'Elisabeth Vigée Le Brun (1755-1842), avec sa fille

     

    Que conclure de tout cela?

    Face à la complexité du monde, ces Journées mondiales, simplement internationales ou européennes font office de piqûres de rappel. Toutes ne sont pas à mettre au même rang des priorités. Certaines relèvent de la galéjade, si ce n’est du mauvais goût. Passe pour la Journée du nœud papillon, mais que viennent faire celles des batailles d’oreiller et du Nutella.

    Plus sérieuses et plus exigeantes sont celles qui nous rappellent toutes ces maladies qui génèrent l’inquiétude et qu’il nous faut combattre en aidant la recherche. Est-ce qu’une Journée mondiale de lutte contre le coronavirus ne viendra pas s’insérer dans le prochain calendrier des rendez-vous à ne pas manquer ? L’avenir le dira. Mais d’ores et déjà retenez que le 15 octobre le monde entier est convié à se laver les mains. On devrait déjà en avoir repris l’habitude.

    Est-ce que le 21 janvier prochain, on pourra fêter la Journée mondiale des câlins ?  Sans attendre, j’en formule le vœu et, sachant qu’en terre kermoustérienne, il se trouve des têtes pensantes qui cultivent cette passion, j’espère pour nos mathématiciens qu’ils auront, quant à eux, la satisfaction - mais pourquoi ne pourrions nous pas la partager à distance ? - d’assister à l’inauguration, le vendredi 12 mai 2021, de la première célébration officielle de la Journée internationale des Mathématiques.

    Sur proposition de l’Union mathématique internationale, la Conférence générale de l’Unesco en avait adopté le principe en 2019. La première célébration officielle aurait dû avoir lieu au siège de l’Unesco à Paris le vendredi 13 mars dernier, mais c’était sans compter avec le coronavirus.

    Pour conclure, quelques lignes qu’il convient de consacrer aux deux Journées européennes du patrimoine telles que nous les avons vécues à Kermouster.

    L’amicale a honoré le rendez-vous en assurant la permanence à la chapelle, les deux après-midi, de 14h30 à 18h30. Point n’est besoin de sortir la règle à calcul pour mesurer l’impact de ces journées. Seulement 15  visiteurs le samedi, jour de fort coefficient de marée, mais 70 le dimanche. Essentiellement des gens des Côtes d’Armor, mais également des Parisiens, des Manchots, des Vendéens et même une Perpignanaise qui a pour elle d’être de la famille de notre nouvelle secrétaire générale de mairie. D’ailleurs, c’est ce 20 septembre  que Delphine Danguis a découvert les « joyaux » de la chapelle. Elle sait déjà que leur conservation et  restauration figurent dans la pile des dossiers dont elle a désormais la charge.

    L’occasion nous a donc été offerte de lui souhaiter la bienvenue.

    Et rassurons nous dès maintenant! L'automne ne sera pas que sanglots. Il ne l'est jamais.

     

     

                                                                                                                           Claude Tarin

                                                                                                             Mardi 22 septembre 2020

     

     

    Haïku d’équinoxe

     

    Tout l’art du haïku est de traduire l’instant. Il est tout aussi difficile de saisir l’éphémère que des merguez sur le gril du barbecue. A la lumière des braises, portée par la douce musique des vaguelettes venant mourir sur la digue, Claudie s’est montrée suffisamment experte sur les deux tableaux pour mémoriser ce qui fut un bon moment de partage.

     

    Marée d’équinoxe
    L’assaut aux dernières merguez -
    Fin d’été sur la digue

     


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